La chasse nocturne a été planifiée à l’avance et je me suis assuré de rencontrer mon oncle autant de fois qu’il le fallait pour ne laisser aucun détail au hasard. Je ne veux pas que Lei-An fasse face à un nouveau traumatisme. D’autant plus que nous ne sommes que deux cadets avec un maître. Je voulais donc m’assurer à tout prix que nous aurions toutes les cartes en main sur la question. De même que je voulais éviter les villages abandonnés pour le moment. Mon but, actuellement, c’est de donner à mon Didi quelques expériences positives pour qu’il puisse sortir sans craindre que le pire n’arrive. Ce sera sans doute difficile, mais rien d’insurmontable si j’en crois sa force d’esprit.

Ainsi, j’étais préparé à tout, sauf à ce que mon oncle tombe malade. Pour son bien, la première chose que nous avons faite est d’aller dans une auberge. J’ai demandé deux chambres et mon oncle a été installé dans l’une d’entre elles. Avec l’aide du plus jeune, j’ai installé mon oncle de sorte à ce qu’il soit en mesure de se reposer et qu’il ait tout ce dont il pourrait avoir besoin durant notre absence. Je doute qu’il ait fait exprès de se mettre dans un tel état. Cela aurait été très difficile par un temps aussi chaud. Aussi, je n’ai jamais entendu dire qu’il avait une santé fragile. Bien au contraire. Cette situation me perturbe énormément, d’autant plus que je ne sais toujours pas si je peux lui faire totalement confiance ou non. J’ai encore du mal à lui pardonner son absence si longue. Cette seule chasse ne pourra pas me donner de réponse. Cela, c’est certain.

Une fois que je suis assuré que mon oncle a tout ce dont il pourrait avoir besoin et qu’il est en sécurité, j’emmène Lei-An avec moi hors de la chambre. Je lui annonce doucement :



Durant ces derniers temps, j’ai pu constater combien Lei-An a confiance en mon oncle. J’ai même l’impression qu’il le prend comme un modèle, que ce soit consciemment ou non. Je crains donc qu’il puisse ne pas vouloir tenter une chasse sans lui. Bien sûr, il est bien plus courageux qu’on pourrait le croire. Je n’en doute pas un seul instant. Seulement, après deux expériences difficiles, je ne souhaite pas le brusquer plus que de raison.



De cette manière, j’espère qu’il pourra voir que je suis prêt à l’écouter et à ne pas le forcer, ou même le mettre dans une situation difficile. Puisqu’il s’agit de ma toute première expérience en tant que chef de groupe, je crains d’en faire un peu trop. Je sais toutefois qu’on n’est jamais trop prudent et puisque Lei-An ne s’est pas encore vraiment ouvert à moi, je redoute le moment où je franchirais la limite sans qu’il ne me le dise.

Depuis que mon oncle a commencé à montrer des signes de faiblesse, j’ai remarqué de plus en plus d’inquiétudes chez Lei-An. Je vois plusieurs raisons qui pourraient l’amener à une telle réaction. La première viendrait de l’appréhension de la chasse. Il s’agit d'une des premières chasses depuis l’attaque de l’utilisatrice de Yuan Qi qu’ils ont rencontré et qui a causé la mort de cadets devant leurs yeux, entre autres. Cette expérience n’ayant rien de vraiment positif, à part qu’ils sont revenus en vie, il est normal qu’il puisse s’inquiéter que quelque chose vienne à arriver alors que notre maître et protecteur soit dans un sale état. Ensuite, de ce que j’ai pu comprendre, Lei-An et mon oncle sont assez proches. Je ne sais pas s’ils le cachent parfaitement bien chacun de leur côté ou s’ils ne savent pas comment se le montrer, toutefois leur relation n’est pas anodine. Comme dit, ils ont survécu ensemble, mon oncle enseigne à Lei-An et ses amis… Je ne sais pas si leur relation implique de la complicité, mais la confiance doit être grande entre eux. Mon frère de coeur doit vouloir que mon oncle se porte bien et n’ait aucune complication, j’imagine. Je dois avouer que j’envie un peu leur proximité… Est-ce une mauvaise chose ? Ce n’est surtout pas le moment. Maintenant que mon oncle se repose, en sécurité dans une chambre d’auberge, je me dois de connaître le point de vue du plus jeune pour savoir si nous pouvons investiguer sur la raison de notre venue ou s’il est préférable d’attendre le rétablissement de notre aîné.

Face à ma proposition de chasser à deux, Lei-An ne me montre aucune crainte autre que celle que j’ai déjà vue plus tôt. Celle qui concerne mon oncle. Comment pourrais-je lui en vouloir ? Mais pourquoi ne m’en parle-t-il pas ? Est-ce pour éviter de m’inquiéter ou que je pense qu’il n’a pas confiance en moi ? … Il est préférable que je ne me laisse pas aller aux doutes. Malheureusement, le moment n’est pas très bien choisi pour parler à coeur ouvert sur nos émotions maintenant qu’il m’a fait part de son accord pour chasser. Je devrais donc le faire plus tard, même si j’imagine que cela sera guère mieux que la dernière fois.

Puisque Lei-An me laisse la parole, j’en profite pour lui faire part de mon plan et lui demander, à nouveau, s’il est d’accord avec ça. Je crains tellement de me montrer aussi peu à l’écoute que mes anciens chefs de groupe que je dois être lourd à force de lui demander son avis. Je préfère quand même lui montrer que je compte prendre en considération ce qu’il pense et répondre à ses questions. Ce n’est pas parce qu’il est inexpérimenté qu’il ne peut pas avoir de bonnes idées ou des commentaires intéressants. De plus, un esprit troublé aura plus de facilités à se faire faucher qu’une personne concentrée sur sa tâche. Maintenant que j’y pense, j’ai vraiment eu de la chance que ma frustration passée ne m’ait pas été fatale.
Une fois encore, Lei-An hoche la tête, me faisant part qu’il sera attentif. Ce n’est pas vraiment ce que je voulais dire et il ne me semble pas lui avoir reproché quoi que ce soit. Si ? J’hésite vraiment à lui demander s’il est troublé. Ce serait une insistance pas nécessaire du tout, sauf pour tranquilliser mon esprit à moi. Peut-être qu’au cours du repas avant d’aller en chasse, ce sera un meilleur moment. Sans compter que, investiguer, chercher les informations dont nous avons besoin, ne demande pas vraiment autre chose qu’une bonne écoute, un esprit ouvert et un peu de perspicacité. Nous ne seront pas en danger à moins qu’un problème ne survienne soudainement, ce dont je doute. Le village est certes troublé, mais pas au point de cesser toute activité de ce que j’ai pu observer en passant. Tout ira bien.

Ayant donc réfléchis rapidement, je souris en hochant la tête, en accord avec moi-même et ce que Lei-An a bien voulu me dire. Je descends donc les escaliers, certain qu’il va me suivre. Puis, voyant qu’il n’y a pas grand monde à l’auberge, et certainement pas les propriétaires sans doute occupés ailleurs, je sors dans la rue principale. Celle-ci est animés de marchands qui tentent d’attirer les clients dans leurs échoppes. J’ai un jour entendu dire que les salons de thé et les endroits où l’alcool coule à flot sont les meilleurs pour obtenir des informations. Pourtant, je ne compte pas m’y rendre. Pas maintenant en tout cas. Je me dirige vers donc vers un étalage de fruits et légumes en demandant à mon cadet :



Quelque chose me dit que, même s’il peut avoir un peu de réserve, il est assez doué pour trouver les bonnes questions. Au pire des cas, je peux toujours lui proposer que nous travaillons les informations à obtenir ensemble avant que nous fassions la conversation avec les passants ou les marchands. Encore une fois, cela sera son choix. Il faut bien commencer quelque part et il est mieux de profiter d’une occasion comme celle-ci pour s’entraîner.

Je me demande à quoi pouvait bien penser Lei-An pour se montrer autant pris par surprise par ma proposition. Enfin, plus que cela, il semblerait qu’il ne s’attendait surtout pas à m’entendre parler maintenant. Toutefois, il ne me demande pas de répéter mes paroles et porte une réelle attention au choix que je lui offre. Je suis bien conscient qu’un contact aussi soudain avec des villageois peut-être grandement impressionnant. Toutefois, puisque mon cadet m’a montré une attitude ouverte à la conversation en général, je pense qu’il pourrait s’en sortir comme un chef. Puis, bien que je ne lui ai pas encore précisé, je ne compte pas le laisser seul dans cette épreuve. Nous ne sommes pas dans une situation dans laquelle le temps est compté. Pas encore, tout du moins. D’autant plus que nous ne pourrons de toute façon pas partir tant que Shui Shui Jun n’ira pas mieux. Alors, même si nous finissons rapidement, nous serons amenés à attendre selon son état de santé.

La réserve qui aurait pu me faire croire qu’il aurait été capable de refuser l’exercice ne le freine finalement pas. Au contraire, il part fort de ses observations, ce qui est grandement encourageant. C’est une très bonne chose puisque c’est en forgeant qu’on devient forgeron. Sans expérience, on ne peut se dire maître en la matière. Peut-être en est-il conscient. Quoi qu’il en soit, j’approuve son attitude d’un hochement de tête et un sourire avant de lui assurer dans l’espoir de l’aider à se détendre un peu plus :



Ca, je ne m’y attendais pas du tout. Au point que je suis bloqué quelques secondes. Qui aurait pu croire que ces quelques mots pourraient m’offrir un aussi beau sourire de sa part ? J’ai cru le revoir quand il était encore enfant. Je me sens nostalgique et… je souhaite de tout mon cœur qu’il puisse me permettre de le voir plus souvent ainsi. Il est tellement mignon avec cette expression !
Bon ! La mission !

Observateur, je me place un peu derrière Lei-An pour maintenir comme étant le principal interlocuteur de ces bonnes gens près de l’étalage de fruits et légumes. La première approche du plus jeune est très bonne. Seulement, il est coupé par une Gunniang qui, en plus de cela, se montre un peu trop familière avec son interlocuteur. Il est bien qu’elle nous ait parlé du problème principal des lieux, toutefois elle est le genre de personne avec qui j’ai du mal à traiter en général. Elle prend trop les devants. Il ne s’agit que de l’excitation face à des cultivateurs et l’envie d’aider, pourtant je n’apprécie pas sa manière de s’imposer sans laisser les autres s’exprimer. Puis, cette manière de prendre les mains de mon petit frère… Je la trouve impolie. Pourtant, pour le moment je ne dis rien, bien que je me tienne prêt à agir à tout moment.
La réaction de Lei-An ne m’étonne pas le moins du monde, pourtant il m’impressionne grandement par le calme dont il fait preuve. Je le laisse donc faire tant qu’il ne me montre pas un signe de détresse ou de demande d’intervention de ma part. Ainsi, le gérant tente de taquiner la Gunniang qui rétorque qu’elle souhaite devenir cultivatrice avant de nous donner de plus amples détails sur le problème de leur cimetière tout en précisant qu’elle souhaite nous accompagner. N’a-t-elle donc aucune conscience du danger qu’elle pourrait courir selon ce que nous pourrions trouver sur place ? Je grimace et remarque que mon cadet ne semble pas très bien. Ou… D’un côté les informations que nous venons de trouver ne semblent pas lui plaire et, d’un autre côté, il rougit. La jeune femme le met-elle dans cet état à force de lui tenir les mains ? Est-il sensible aux avances qu’elle semble lui faire ? Quoi qu’il en soit, il garde contenance et demande à son interlocutrice s’il y a eu de nouvelles arrivées en ville. Pense-t-il déjà à un utilisateur de Yuan Qi ?

La question n’est pas inutile, bien au contraire. Après tout, il faut prendre en compte toutes les possibilités, surtout quand on ne sait pas à quoi nous avons affaire. D’un autre côté, je m’inquiète que cela soit la première chose à laquelle il pense. Cela démontre à quel point sa première expérience a été traumatisante, bien qu’il ne semble pas en avoir conscience. Ou qu’il veuille passer outre.



Il faut que j’intervienne avant qu’elle ne commence à penser que le silence de mon cadet équivaut à un accord que personne n’a donné. Je fronce donc les sourcils et, d’un ton un peu plus ferme qu’à l’accoutumée, je lui réponds :



Je prends un instant pour me détendre un peu avant de reprendre :



A vrai dire, je préférerai avoir une réponse du gérant de l’étalage de fruits et légumes qui a l’air plus sérieux ou, au moins, plus respectueux que cette Gunniang bien trop excitée à l’idée d’être en contact avec des cultivateurs comme nous. Pourtant, si c’est elle qui nous donne une réponse, je reste à son écoute, laissant même Lei-An reprendre la main s’il le souhaite.

La réaction de mon cadet face à l’excitation de la Gunniang et son impolitesse ne m’étonnent pas. Enfin, dans une certaine mesure, il m’impressionne par le calme dont il fait preuve. Je ne suis pas sûr que j’aurais été capable de faire preuve d’autant de douceur face à un tel comportement bien que je sois une personne relativement plus tactile que la moyenne au sein du clan. Bon, en même temps, si je prends mon Shifu et oncle comme exemple, il n’est pas bien difficile d’être plus tactile. Toutefois, pour aider Lei-An qui a l’air encore plus réservé que lors de nos retrouvailles, je prends la parole en espérant faire comprendre à notre interlocutrice qu’elle n’est pas conviée à notre chasse même si ses informations nous sont fort utiles.
Je ne saurais dire sur le coup si mon intervention exaspère, soulage ou frustre le plus jeune qui soupire. A moins qu’il ne soit en train de tenter de faire retomber la pression due à cette nouvelle expérience plutôt intense couplée avec la crainte de se retrouver face à un utilisateur de Yuan Qi encore une fois. Dans cette mesure, je peux tout à fait comprendre sa réaction et je ne peux qu’être impressionné par son sang froid. N’importe quel autre garçon de son âge aurait commencé à paniquer à sa place.

Afin d’apaiser un peu plus la situation et vérifier qu’il puisse s’agir d’une autre option que celle craint par mon cadet, je demande aux personnes étant à notre écoute si le village a connu des morts récentes et leurs circonstances. Fort heureusement, c’est le gérant qui me répond volontiers qu’un moine d’un monastère proche a été enterré quelques semaines auparavant. Une information intéressante qui nous offre une autre piste, ce que j’espérais, bien que nous n’ayons pas plus d’informations sur le sujet. Il semblerait que nous allons devoir enquêter un peu plus profondément sur les causes de la mort de ce Dàozhàng. Après tout, contrairement à ce que j’ai pu demander, nous n’avons eu le droit à aucun détail sur la question.
Profitant du silence qui se fait depuis quelques secondes, Lei-An demande la direction menant au monastère. Une très bonne initiative de sa part pour laquelle je compte bien le complimenter. Il a bien appris en observant ses aînés et je comprends même un peu mieux pourquoi il est autorisé à chasser malgré son jeune âge, bien que je n’eus aucunement douté des décisions prises par mon Zǔfù et Zōngzhu.
Bien que l’information ne lui semble pas utile dans la mesure où le monastère est désormais désert, le gérant du stand de fruits et légumes nous indique la route à suivre. Cela appris, nous saluons notre interlocuteur et je fais face à un jeune homme visiblement curieux. Peut-être souhaite-t-il me demander… Oui, c’est cela. Ignorant totalement les signaux envoyés par la Gunniang, ce qui est une bonne chose vu l’énergumène, il me demande si nous allons voir le monastère dont on nous a parlé. Je hoche la tête et lui répond avec tranquillité comme si aucune mouche ne nous tournait autour :



Sous mon regard bienveillant, le cadet remercie et salue le gérant, ce que je fais à sa suite, trop fier pour m’y prendre en même temps que lui. Puis, je le vois parler à la Gunniang qui me semble passer d’une moue boudeuse à une mine radieuse qui ne fait que se rembrunir de plus belle alors qu’on lui confirme qu’elle ne peut pas nous accompagner. Je suis surpris qu’il la conseille sur la manière qu’elle pourrait employer pour devenir une cultivatrice. Des conseils fort avisés, je dois l’admettre. Au vu du caractère de la jeune femme, Yunmeng Jiang serait un bon endroit pour cultiver, ou Qinghe Nie avec leur caractère bien trempé couplé avec l’utilisation des sabres. Etrangement, je vois mal cette Gunniang avoir la finesse nécessaire pour apprendre la maîtrise d’une épée. Après, la véritable question concernera avant toute chose son talent pour la cultivation. Sans une capacité élevée de réserve de Qi de naissance, elle ne pourra jamais atteindre son rêve quoi qu’elle fasse.

Lorsqu’il a terminé, je fais signe à Lei-An qui s’est tourné vers moi afin qu’il me suive afin que nous puissions rejoindre le monastère. En chemin, alors que je marche plutôt calmement puisque nous ne sommes pas pressés, je fais part de ce que j’ai à dire à mon cadet :



J’aimerais pouvoir parler librement avec lui de son traumatisme. Toutefois, je pense qu’il est préférable que nous trouvions la raison de la mort de ce moine et s’il pourrait être la cause réelle de toute l’agitation qui secoue la ville avant cela. Je ne voudrais pas faire monter un peu plus la panique du plus jeune alors qu’il s’agit de la toute première possibilité à laquelle il ait pensé.

La marche vers le monastère est calme, ce qui me donne la possibilité de dire ce que je veux à Lei-An sans que nous soyons coupés d’une manière ou d’une autre. J’ai besoin de ce temps pour l’aider du mieux que je peux à la place de notre Shifu. De ce fait, je pense avoir dit tout ce qu’il y avait à dire. Dans ce cas, pourquoi ai-je l’impression d’avoir prononcé des mots que je n’aurais pas dû ? Plutôt qu’émettre des hypothèses sans doute erronées, je préfère attendre qu’il se confie à moi et, peut-être me pose quelques questions qui me permettraient de mieux comprendre le fond de sa pensée.
Chacune de mes paroles a eu son lot de réactions de sa part. Certainement du plaisir et peut-être de la gêne face au compliment que je lui ai fait. De la compréhension face à mon avis. Ce dernier étant purement personnel, j’espère qu’il ne l’a pas pris comme une leçon de ma part.

Alors que je crains ce qu’il pourrait penser, je l’entends me demander mon attention. Bien entendu, puisqu’il l’a, il peut continuer immédiatement. Je comprends dans la seconde qu’il veut me parler de son attitude. Que se passe-t-il ? Ce que j’apprends à travers sa question et ses explications me laissent quelque peu dubitatifs. Je ne m’attendais pas du tout à ce qu’il voit son comportement comme étant un manque de sang froid. Cela est très étrange à mes yeux et m’amène à réfléchir sur ma propre retenue.
Ne souhaitant pas le laisser dans un état de doute et une vision fausse de ce qu’est le manque de sang froid, je me reprends rapidement afin de lui répondre aussi justement que possible :



A vrai dire, j’aimerai également lui demander ce qu’il aurait voulu dire à cette Gunniang sans manière. Cela pourrait être drôle, dans une certaine mesure. Toutefois, je doute qu’il soit sage d’insister sur la question si lui ne le souhaite pas. Son silence me donne un bon indice quant à cela. Je me demande s’il également s’il a l’impression que, comparé à lui, j’ai gardé mon sang froid face à elle. Si lui ne l’a pas fait, alors je fus bien pire. Je ne me savais pas du genre à avoir le sang chaud… Il faudrait que je tente d’en parler avec Yishi Shifu ou Zǔfù, histoire d’apaiser un peu mon esprit. Ce n’est vraiment pas simple de s’occuper d’un cadet.

Le silence qui s’est installé entre nous est long. Pourtant, je le respecte. Je lui laisse le soin de le briser et, quand il se permet de le faire, je suis quelque peu attristé qu’il ait décidé de changer de sujet. D’un autre côté, ce n’est pas une mauvaise question et j’y répond sans détour :



Est-ce que je vais un peu trop vite en besogne ? Suis-je trop prudent en n’écartant absolument aucune possibilité ? A vrai dire, je ne fais pas vraiment confiance en cette Gunniang. Après tout, même si personne n’a réfuté ses dires, personne n’a paru être totalement d’accord avec elle non plus. C’est à s’en tirer les cheveux.

Pour le moment, nous arrivons au monastère. Comme le gérant nous l’a annoncé plus tôt, personne ne semble l’habiter. Je prends un instant pour écouter, dans le doute que nous puissions être trompé par les dires des autres et l’état des lieux. Pourtant, non. Rien à signaler. Je fais donc signe à Lei-An d’entrer avec moi tout en restant attentif à ses questions.